Il parcourt le monde pour représenter son pays en triathlon. Originaire de Vaudreuil-Dorion, Xavier Grenier-Talavera tente de se faire une place parmi les meilleurs au monde et aspire à participer aux Jeux olympiques de Tokyo en 2020.
Portrait d’un jeune homme dans la fleur de l’âge dont les meilleures années sont encore devant lui.
Au moment de réaliser son entrevue pour écrire cet article, le jeune athlète posait le pied au domicile familial le temps d’y ouvrir ses valises, de laver ses vêtements et de repartir en Espagne, muni d’un billet aller seulement. Tout athlète d’élite vous le dira : il n’y a de routine que le mot dans le monde particulier dans lequel ils vivent. Du haut de ses 22 ans, Xavier Grenier-Talavera nage, roule et court parmi les meilleurs au monde depuis quelques années déjà. Initié à la pratique du sport très jeune, l’athlète a eu la chance de grandir dans une famille sportive : « Mes parents me supportaient dans tout ce que je faisais, raconte-t-il, ils ne m’ont jamais forcé. C’est une des raisons pourquoi j’ai continué à aimer le sport de plus en plus. » Il a joué au soccer et au hockey avant d’entrer dans le club de triathlon Tri-O-Lacs à l’âge de 8 ans et y revient régulièrement encore aujourd’hui. Au fil du temps et des entraînements, le goût de compétitionner et de se dépasser a fini par faire de lui un aspirant à l’équipe nationale de triathlon : « Ça a toujours été un rêve d’aller aux Jeux olympiques, précise Xavier, mais plus jeune, ce n’est pas ce qui me motivait. C’était avoir du plaisir dans le moment. Et je me rendais compte que plus je m’investissais, plus j’avais les résultats que je voulais aller chercher et avec les résultats que j’allais chercher, ça me motivait à continuer à aller vers la prochaine étape, à faire des podiums. » Des podiums, il en a cumulé une collection et poursuit en ce moment son développement au sein de l’équipe nationale canadienne avec une douzaine d’autres athlètes de partout au pays.
En raison de sa constitution, le triathlon est un sport qui se développe lentement. La moyenne d’âge des athlètes, au départ du triathlon aux Jeux de Rio l’an passé, était de 29 ans. Avant même de penser concourir au plus prestigieux rendez-vous sportif du monde, un triathlonien doit donc suivre les étapes une à la fois. Dans le cas de Xavier, il a gravi lentement les échelons en participant à diverses coupes continentales puis à des coupes du monde avant de se mesurer à ses pairs lors des séries mondiales, le summum mondial du triathlon. Xavier appartient déjà au top 20, ce qui est excellent compte tenu de son jeune âge : « Nous sommes tous assez forts pour notre âge, mais pas encore assez développés pour compétitionner dans les séries mondiales avec les habitués et les meilleurs au monde, mentionne-t-il au sujet de ses coéquipiers de l’équipe nationale. C’est vraiment une question de développement pour les années à venir. » Il faut dire que la fédération canadienne de triathlon a connu une année post-olympique pour le moins particulière, ce qui est bien souvent le cas après le passage des jeux. Résumé simplement, la fédération, en plus de voir ses vivres coupés, a misé sur l’excellence en haussant ses critères de sélection permettant aux athlètes canadiens de participer à une série mondiale. Il est donc difficile pour les athlètes du pays de participer aux plus importantes courses sur le circuit mondial. Plutôt que de jeter la faute sur qui que ce soit, Xavier profite de chaque course, de chaque compétition et de chaque instant pour s’améliorer un tout petit peu chaque fois. Il préfère la distance olympique (voir encadré) et se considère plus fort en natation, jetant un regard pragmatique sur la discipline qu’il chérit depuis près de 15 ans : « En triathlon, il est rare que tout soit mauvais, admet-il. Habituellement, c’est une chose qui fait dérailler ta course. Il est donc difficile d’avoir LA course, plusieurs pièces doivent être mises en place. Tu ne peux pas gagner la course en natation, mais tu peux définitivement la perdre. En vélo, il y a de plus en plus de parcours urbains, super techniques. Il faut être assez fort pour rester avec le groupe. Et à la course à pied, c’est là que ça se gagne. Mais tu ne peux plus avoir de faiblesse évidente, tu dois être complet ». S’il refuse de comparer ses courses en raison de la différence entre les parcours (nager dans un lac n’est pas du tout comme nager dans un fleuve par exemple), le jeune homme finit par avancer des temps de 1h50’, 1h55’ en distance olympique et de 48’ en distance sprint. Les connaisseurs de triathlon apprécieront ces temps. Quant aux courses mémorables, Xavier Grenier-Talavera considère sa 19e place à Edmonton l’an passé, une course en série mondiale, et sa 9e position à Cozumel au Mexique, une course de championnat U23, parmi ses principales réussites. Mais il rappelle que la constance est plutôt rare d’une course à l’autre.
Comme n’importe quelle vie d’athlète, il existe tout plein d’imprévus quand on atteint le sport d’élite, à commencer par les blessures. Il aura beau toucher tout le bois voulu, Xavier n’est pas à l’abri d’un coup de chaleur ou d’une chute à vélo. De façon à s’offrir un plan B pour ce temps où le triathlon sera souvenir et source de fierté, il poursuit actuellement son baccalauréat en commerce à temps partiel et tente tant bien que mal de gagner sa vie : « Je suis plutôt en mode survie, répond-il quand on le questionne sur son statut d’athlète professionnel. C’est assez semblable partout dans le monde, excepté pour les 10-15 premiers mondiaux. Sinon, c’est très difficile de gagner de l’argent en triathlon. » Il existe des circuits en France et en Allemagne où les meilleurs athlètes au monde sont recherchés et payés par différents clubs de triathlon pour concourir, mais au-delà de ça, le programme « À nous le podium » et les crédits d’impôt n’arrivent pas à amasser les milliers de dollars nécessaires à parcourir le monde aux couleurs de l’équipe canadienne. Xavier a pris part à 19 compétitions l’an dernier et son horaire pour les semaines à venir n’est pas de tout repos, mis à part un arrêt complet d’entraînement de deux semaines à la fin de la saison. Comment fait-on avec cet horaire noirci, cette recherche de fonds, ces entraînements éreintants pour garder le moral? « Sans plaisir, je ne crois pas que tu peux vraiment performer. Faut que tu acceptes ce qui t’est donné et faire de ton mieux avec ce qui t’est donné. Faut lâcher prise. Le reste, on ne peut pas le contrôler. On peut l’influencer, mais pas le contrôler. » Pour ce qu’il incarne et représente, Xavier Grenier-Talaveras est une fierté de notre région. Par son zèle, son calme et ses valeurs, il a su gravir les échelons un à un, et peut aspirer aux plus grands honneurs si toutes les pièces du puzzle se mettent en place. Il souffle au cou des plus vieux, il conseille les plus jeunes à le suivre dans cette vie qui n’est pas sans douleur : « Tu dois te faire confiance, et ainsi être capable d’aller chercher le meilleur de tes capacités, enseigne-t-il. Il faut se fier à l’entraînement qu’on fait, ignorer la douleur, essayer de se concentrer sur l’effort à faire et de faire un tunnel. Faut juste aller vite! » Aller vite, que l’on ait 22 ou 42 ans, avant que les poursuivants nous pourchassent, avant que ne faiblisse notre corps vieillissant.
(« trois concours » selon son origine étymologique) regroupe trois épreuves, soit la natation, le cyclisme et la course à pied. En version sprint, le participant doit parcourir 750 mètres de natation, 20 km de vélo et 5 km de course à pied. En version olympique, les distances sont doublées : 1.5 km de natation, 40 km de vélo et 10 km de course à pied.
Par : Patrick Richard