À une époque où les enfants jouent pour le plaisir de jouer, d’autres bougent pour effacer quelques kilos de trop. Au milieu des années 1990, Jonathan Bibeau pratique le t-ball, le karaté et le football afin de dépenser le plus de calories possible et retrouver un poids qui ne fera pas tourner les têtes embarrassées de ses collègues. Il garde toujours sur lui une photo de sa période adolescente pour les clients qui lui disent que ce sera trop difficile : « Ça me fait plaisir de sortir ma photo pour leur dire : je sais exactement ce que tu vis, je sais que ce n’est pas facile, mais je te dis que si tu continues de garder le focus et une bonne motivation et de t’entourer des bonnes personnes, tu vas atteindre tes objectifs », mentionne le kinésiologue.
Motivé par un désir constant de bouger, Jonathan Bibeau a suivi sa route en prenant parfois des directions insoupçonnées qui ont fait qu’il est devenu celui qui prêche maintenant par l’exemple.
La boxe comme échappatoire
À Salaberry-de-Valleyfield où il a complété son parcours scolaire, Jonathan Bibeau prend sa place au sein de sa famille. Il est le plus jeune des quatre enfants : « Faut que tu apprennes à être plus toff que les autres, sinon ils vont te marcher dessus », affirme-t-il en riant. À la fin de son adolescence, au moment où il quitte le football, il entame la pratique de la boxe à l’école de Francis Lafrenière qui le motive à se dépasser et à se développer davantage : « Quand tu es adolescent, tu te cherches et tu te demandes dans quoi tu es bon, se rappelle-t-il. Tu te demandes où tu t’en vas, c’est sûr que ça a un gros impact. » Poussé par ces encouragements, il poursuit son apprentissage, gagne en assurance et s’amourache lentement des sports compétitifs et de combat. Mais ce qui le motive d’abord et avant tout dépasse le simple cadre du sport : aider et transmettre ses connaissances et ses expériences.
Quand la vision t’amène ailleurs
C’est empreint de cette mentalité d’entraide qu’il dirige ses études afin de devenir policier. Mais la vie étant ce qu’elle est, les plans changent abruptement en raison de sa vision, un sens qu’il ne pensait jamais être au cœur de son changement de carrière. On lui apprend qu’il est daltonien à un niveau trop élevé pour espérer devenir policier. « Du jour au lendemain, après des années d’effort, tu te fais dire que ton plan a, b et c, ça ne sera pas ça », évoque-t-il, sans amertume. La même journée, il se rend au gym évacuer les tensions et quelqu’un vient le voir pour lui demander de l’aide. On l’approche parce qu’il est tout le temps là à s’entraîner. « J’ai vu ça comme une illumination, croit celui qui allait orienter son parcours vers la kinésiologie. Une porte s’est fermée, mais une autre s’est ouverte pour moi ».
Redonner le pouvoir aux gens
C’est ainsi que Jonathan Bibeau, à l’aube de la trentaine, complète un stage au Centre Multi-sports et ses études à Trois-Rivières avant de dénicher un poste parmi l’équipe des kinésiologues du centre. Au-delà des études et des connaissances acquises, le jeune homme souhaite partager ce que le sport a apporté dans sa vie. Un apport qui dépasse largement la santé et le bien-être physique : la confiance en soi, le dépassement, la connaissance de ses limites qui vont bien souvent au-delà de notre esprit. « L’esprit ne se rend pas compte qu’on est dans des maisons, il pense qu’on est encore dans la jungle, estime-t-il pour illustrer le fait que nous sommes toujours capables d’aller plus loin que ce que notre tête nous dicte. Comme kine, c’est la différence que je veux faire : redonner le pouvoir au monde qu’ils ont, mais qu’ils ne savent pas qu’ils ont. J’ai eu la chance de le découvrir jeune dans ma vie. » Appréciant le fait de travailler en face à face avec les clients (quand la distanciation sociale n’est pas d’actualité, il va s’en dire), Jonathan Bibeau carbure de voir les gens compléter leur premier squat, leur premier redressement assis. Comme kinésiologue, il souhaite aider les gens à se dépasser, au même titre que lui-même l’a fait et continue de le faire. « Je veux vraiment être vu comme un motivateur, dit-il. Tout part de la tête. J’ai beau avoir le meilleur engin, si le moteur ne marche pas, la machine ne marchera pas. » Pour se dépasser, tout sportif digne de ce nom dira qu’il faut impérativement savoir pour quels motifs on pousse la machine à fond. En d’autres termes, la motivation est au cœur d’un entraînement régulier et progressif : « Si je m’entraînais juste quand ça me tente, je ne m’entraînerais pratiquement jamais, précise-t-il. Faut vraiment chercher la raison du pourquoi. Moi, c’est le mouvement, c’est le après, c’est la sensation de dépassement. »
L’apport d’un kinésiologue dans sa vie
Jonathan Bibeau poursuit donc sa route en peaufinant ses connaissances et en visant autant la préparation physique des athlètes que les sports de combat. Comme il l’enseigne, « Le but n’est pas toujours de sprinter, mais de toujours avancer ». À court terme, il souhaite que les gens s’informent et comprennent les bénéfices que peuvent apporter les kinésiologues dans leur entraînement et dans leur vie personnelle : « Le sport, c’est toute ma vie, résume-t-il. Me dépasser, sortir de ma zone de confort, la motivation doit venir de soi afin d’essayer d’être la meilleure version de soi-même tous les jours. » Venant d’un jeune qui a su se servir du sport comme tremplin, on le prend et on prêche à notre tour par l’exemple.
Patrick Richard